lundi 11 avril 2016

Lolita




J’ai une immense admiration pour Stanley Kubrick, mais il n’est pas un dieu et dire qu’Adrian Lyne l’a surpassé dans « Lolita » n’est pas non plus un crime de lèse-majesté.

Le film d’Adrian Lyne est supérieur à celui de Kubrick sous tous les rapports.

Tout d’abord, il est plus près du roman de Nabokov et plus fidèle à son atmosphère. Visuellement, il est impossible de croire une seconde que la Lolita de Kubrick n'ait que 14 ans. Elle en paraît dix de plus.

Les prises de vue sont plus belles et mieux cadrées.

Les personnages sont plus sympathiques.

Chez Kubrick, le professeur joué par James Mason est un adulte grincheux et brutal. Lolita est une petite sotte, sa mère une hystérique.

Chez Lyne, Jeremy Iron est sympathique, Lolita aussi, et de plus, Dominique Swaine, qui joue Lolita, n’avait vraiment que quatorze ans au moment du tournage et cela se sent. Elle imprègne le film d’une fraîche, délicate et naïve sensualité alors que l’héroïne de Kubrick était plutôt malsaine.

Le prof de Kubrick n’est qu’un vieux vicelard. Celui de Lyne est victime d’une passion aux accents raciniens. « C’est Vénus tout entière à sa proie attachée » pourrait-on dire. La fin révèle en lui une vraie noblesse d’âme.

On s’identifie à lui, beaucoup plus qu’on ne le fait avec James Mason. Si le lecteur ou le spectateur ne peut s’identifier – ne serait-ce qu’en partie – avec le personnage principal, il s’ennuie.

En faveur de Kubrick, on peut dire que son époque n’était pas celle de Lyne. La culpabilité de James Mason relevait d’une culture dominée par l’égoïsme, la frustration et une ambiance anti-sexuelle oppressante. La culpabilité que ressent Jeremy Iron est d’ordre éthique et émotionnel. Elle est, vers la fin, rachetée par sa générosité et son abnégation.

Je suis persuadé que Nabokov aurait choisi la version de Lyne avec enthousiasme. En tous cas c’est nettement mon choix.

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