vendredi 8 juillet 2022

 BACK AND FORTH

A long time ago, during the last century in fact, I used to listen to BBC Radio 3 as the only classical music station in a country of 70 million people. (Other countries are not doing much better).

Then came Classic FM, and it was like a breath of fresh air. The two stations were not in direct competition. Radio 3 would broadcast full-length compositions, whereas Classic FM introduced their listeners to the vast world of composers by playing short passages. Up to you, after that, to download the complete work or buy the CD.

I therefore found myself listening almost exclusively to Classic FM. To make matters worse, Radio 3 often seemed to favour shunting train symphonies or concertos for rusty hinges.

Then Classic FM changed : more and more commercials, more and more insipid choice of music and a detestable habit of mumbling the names of composers at full speed. If a name is not instantly familiar, you don't get a chance to catch it.

So, back to BBC Radio 3, if not all the time, at least some of the time.

mercredi 6 juillet 2022

 

FIERTE

Je suis fier d'être... On peut choisir : danois, ougandais, néerlandais... Ou encore : ton fils, ton ami, ton époux... ou bien : artisan, tailleur, ingénieur...

Mon arrière-grand-mère a remis les pendules à l'heure le jour où, comme un perroquet, je lui ai dit que j'étais fier d'être français.

« Qu'as-tu fait pour en être fier ? » m'a-t-elle demandé. Elle n'attendit pas la réponse car il n'y en avait pas.

Elle enfonça le clou : « As-tu décroché un doctorat ? As-tu remporté le Vendée-Globe ? As-tu découvert un nouvel antibiotique ? »

Elle s'adoucit et continua : « On dit Je suis fier alors qu'on devrait dire J'ai de la chance. Tu as la chance d'être né dans un pays pétri de culture littéraire, artistique, architecturale et scientifique, mais tu n'y es pour rien. Tu as la chance d'avoir des parents qui t'offrent un niveau de vie correct et la possibilité de faire des études, mais tu ne les a pas choisis . La chance d'être dans un pays démocratique, mais tu n'as rien fait pour cela. Ce n'est qu'en devenant digne de toutes ces chances que tu pourras dire un jour : « Je suis fier d'avoir honoré mon héritage culturel en accomplissant ceci ou cela. »





samedi 18 juin 2022

 

Note de lecture : 

 

Sarah Moss’ Summer Water


Title : a (very) flawed masterpiece.


John Irving can get away with it, but when it comes to Sarah Moss, I have doubts.

Adopting a conversation style, chatting with the reader,

 flitting from one subject to another and slapping sledgehammer judgments 

on this and that (such as men who don’t like public hair), 

can appeal to some, perhaps, even, to many. Personally, 

I find it tiring, and it is a pity because some of the metaphors, 

evocations and dreams are excellent. 

L'impossible recherche ?

 


Si Joanne (J'ai changé les noms, bien sûr) haïssait les hommes, Linda les aimait. Elle « couchait » comme on dit dans les villages. Elle aimait les hommes mais elle les méprisait aussi et, en fin de compte, elle les haïssait.
J’ai été son collègue de travail pendant quelques années. Au début, je savais vaguement qu’elle changeait assez souvent de petit ami mais cela ne m’intéressait pas. Lors de plusieurs voyages scolaires avec elle, nous commençâmes, par la force des choses, à bavarder. Je me suis alors aperçu qu’elle allait draguer ses mâles dans les bars et les boîtes de nuit. Certes, il doit exister, ici et là, des couples aimants et durables qui se sont rencontrés comme cela mais, dans l’ensemble, le taux de ratés, de tordus, de violents, d’irresponsables, d’égoïstes et de demeurés est tout de même plus élevé dans ces endroits-là que dans les autres. Linda ne comprenait pas que l’on puisse trouver l’âme sœur autrement. Le dernier en date dont elle m’ait parlé avant que j’aille enseigner ailleurs, insistait pour lui pisser dessus. Ne faisant pas partie du nombre infinitésimal de femmes qui aiment cela, elle s’apprêtait à le quitter. J’ai vainement essayé de la convaincre que tous les hommes n’étaient pas des nuls. Cependant, notre établissement étant un collège-lycée mixte, force m’était de constater l’insondable indigence intellectuelle et émotionnelle d’une écrasante majorité de garçons. « Quand on est con, c’est pour la vie » dit le proverbe. La pauvre Linda passait d’une période de déprime à celle d’un optimisme inattaquable quant aux qualités du prochain partenaire. J’avais envie de lui conseiller d’essayer les femmes mais je n’étais pas assez proche d’elle pour cela, et ne souhaitais pas le devenir…
Il y a des femmes, comme cela, qui attirent irrésistiblement les imbéciles et sont attirées par eux. Elles ne se rendent pas compte qu’il existe tout de même un autre monde. C’est comme si on leur avait jeté un mauvais sort. On ? Qui ? Les parents peut-être.

vendredi 17 juin 2022

 

Note de lecture :

Je viens de terminer Le Train de George Simenon. Quel délice ! J'avais oublié à quel point c'était un grand auteur. La rigueur de son style évoque celle d'Albert Camus.

Ce n'est pas un roman policier. Pas d'inspecteur Maigret, et pourtant la tension nerveuse et la menace de l'incertitude sur l'avenir sont présentes dès le début. Marcel va-t-il quitter sa femme pour Anna ?

Le récit aurait pu se terminer dans un nuage de tristesse sur les marches de la maternité de Bressuire. La fin est encore plus triste, mais aussi plus noble et plus admirable.

Comme dans beaucoup de ses romans – et là encore, je le rapproche de Camus – Simenon nous opresse par cette sensation que nous sommes simplement les jouets des circonstances.


samedi 11 juin 2022

 

Aimer et souffrir. 

Quand on aime vraiment, profondément, passionnément, on souffre sans répit. On souffre dès que l’on n’est plus avec l’être aimé, ce qui est logique. Par contre, ce qui est beaucoup moins logique, c’est de continuer à souffrir lorsqu’on est en compagnie de l’être aimé. Notre deuxième cerveau, sous le nombril et le pubis, hésite et tourne comme une baratte : lancinante et délicieuse douleur dont on ne voudrait pour rien au monde se débarrasser. Je ne parle absolument pas d'érections ou de sécrétions vaginales : c'est plus profond, plus essentiel et plus subtil. On peut avoir la peur au ventre, mais on peut aussi avoir l’amour au ventre. « Suis-je amoureux ? » se demandent certains. Si tu as “l’amour au ventre”, alors oui : tu es amoureux.

mercredi 30 mars 2022

 

220330

Au cimetière militaire de Kleve, je suis allé me recueillir sur la tombe de John. C'était un oncle à la mode de Betagne, ou plutôt de Grande-Bretagne. Pendant la deuxième guerre mondiale, il était mitrailleur de queue sur Lancaster.

Lors d'une mission, sa tourelle fut attaquée par un Messerschmidt et John fut grièvement blessé.

Amadeus, son meilleur ami, rampa vers la tourelle pour apporter son aide. Le Messerschmidt revint à la charge et, cette fois, transforma la tourelle en un véritable charnier.

Touché à mort, le Lancaster alla s'écraser dans un champ où il prit feu.

Dans ce qui restait de la tourelle arrière, les Allemands ne trouvèrent qu'un ignoble mélange d'entrailles et d'os brûlés. Ils trouvèrent aussi les médailles d'identification mais sans pouvoir les attribuer à certains restes plutôt qu'à d'autres.

Les deux amis furent mis dans le même cercueil. Leurs deux noms apparaissent sur la stèle.

Ils avaient dix-huit ans !

 





lundi 28 février 2022

 

AGNUS DEI

Si l’on considère la longue liste de tortures que l’humanité a infligées à ses propres représentants, on a honte d’en faire partie. Certes, les animaux peuvent être cruels les uns envers les autres. Oiselets qui poussent le plus faible d’entre eux hors du nid, lions qui tuent les lionceaux dont il ne sont pas les procréateurs, chimpanzés qui assassinent l’étranger venu s’aventurer dans leur groupe… on pourrait continuer ainsi pendant des heures. Même les abeilles piquent celles qui se trompent de ruche. Cette agressivité recouvre souvent le simple instinct de survie. Qu’elle soit génétiquement passée des animaux à l’homme n’a donc rien d’étonnant. La devise pourrait être  “La tribu d’abord”. 

Là où l’homme dépasse les animaux dans le domaine de l’indignité, c’est par l’invention de la torture. Elle est perpétrée par tous les groupes qui se sentent invulnérables, illustrant parfaitement le vieil adage : “Le pouvoir corrompt, le pouvoir absolu corrompt absolument”. 

J’ai souvent lu ou entendu dire que le XX° siècle avait inventé la guerre idéologique. On pense au nazisme et au communisme, mais ces idéologies ont simplement rempli le vide laissé par les religions. Si l’on compare le fanatisme des Catholiques envers les Cathares, les Juifs et les Protestants, celui des Protestants envers les Catholiques ou celui des Musulmans envers tous ceux qui ne sont pas musulmans, on observe peu de différence avec le fanatisme des Nazis envers tous ceux qui ne sont pas nazis ou celui des Communistes envers tous ceux qui ne sont pas communistes. Avec leurs chapelets d'atrocités, il n’y a aucune différence entre les guerres de religion et les guerres idéologiques. Elles sont toutes les deux à la recherche du pouvoir absolu. L’homme, semble-t-il, ne résiste pas au besoin de faire partie d’un groupe assez puissant pour imposer ses idées en faisant subir au reste de la population les plus horribles traitements.

Il y a longtemps qu’une partie de l’humanité prend conscience de cette tentation qui lui pourrit l’âme et le cœur. Dans la bible, c’est le concept du péché originel. On pense résoudre le problème en envoyant un pauvre bouc, qui ne comprend rien à ce qui lui arrive, mourir de soif dans le désert. L’absurdité rejoint facilement l’horreur dans les religions et les idéologies. On arrive au Nouveau Testament où un “prophète” pense pouvoir prendre sur lui ce péché originel. 

Certains y croient. Les Agnus Dei de Mozart, Fauré ou Barber nous arrachent des larmes, car en tant que représentant de l’espèce humaine, chacun de nous sait à quel point il peut lui-même être cruel et à quel point il aimerait être débarrassé de ce fardeau. Si nous avons de la chance, le monstre qui dort en nos poitrines se limitera à ne torturer que son propriétaire.  


vendredi 25 février 2022

 

Picture a straight, flat seashore on the Atlantic side. Seagulls would glide and screech. In a spot where a very small river flows into the sea, human presence has widened the estuary and turned it into a harbour. It is called Beakport. The whole thing is no more than a hundred metres long. A few pleasure boats moor in it regularly but most vessels are special aluminium barges used to gather mussels, oysters and clams. 

On the inland side of the harbour stands a black wooden structure that looks as if it is going to collapse any moment. It is a restaurant of sorts where you can order platters of oysters, clams or moules marinières with chips and a bottle of dry white wine. 

At the mouth of the harbour stands the smallest lighthouse you’ve ever seen : no higher than a flagpole. All around are fields of high grass and reeds. There is also a donkey who occasionally shatters the peace with loud, heartbreaking remarks.

The place is peaceful and flat. You could easily describe it as “big sky country”. I took Isabelle there once. She loved it, though she did not say so at the time. I met her again a couple of years later. “Oh !” she cried out, “Could we please go back to Beakport ? It is so beautiful !”

Now, I would never say that Beakport is ugly. It’s got charm. I can imagine a painter evaluating its potential for a series of watercolours, but I would never advertise it as the sort of beauty spot that one cannot afford to miss. It is a nice little place, that’s all. 

So, what is beauty in the billions of circuits of our brains ? What could have triggered such a reaction in Isabelle’s mind ? Did Beakport touch on some fleeting impression going back to her early childhood ? Does it subconsciously symbolise happiness ? Has my friend improved it in her imagination, and would she be disappointed if we went back ?

“Beauty and the mind !” Nice title for a PhD dissertation. Leaning down over the edge of the human soul, one can only feel scared and dizzy.

jeudi 3 février 2022

 

TV review : “Pretty hard Cases”

Pretty hard Cases takes place in Toronto. We follow the joys and tribulations of two women detectives. 

Adrienne Moore, who plays detective Kelly, is terrific, believable and likeable. The dialogues and situations are sometimes funny. 

It could have been a great TV series if the actors had not been asked (or forced) to speak at 100mph and (with the exception of Adrienne Moore) move around like puppets on amphetamines. This hysterical activity means that the whole show sounds and feels hollow. I gave up half-way through the second episode. 

samedi 22 janvier 2022

 

“Moi, l’art français, je ne l’ai jamais vu.” L’aveugle auteur 

de cette remarque adore parler anglais, même quand ce n’est pas 

nécessaire. Peut-être devrait-il prendre le temps de 

regarder un programme de la BBC 

(on ne fait pas plus anglais que la BBC) 

divisé en trois émissions d’une heure chacune, 

et intitulé “L’Art de la France.” 

jeudi 20 janvier 2022

2220120

Je me sens pris entre deux feux. D'une part mon aversion pour l'église catholique est bien réelle. L'hypocrisie qui consiste à justifier les horreurs qu'elle a fait subir pendant des siècles à tous ceux et celles qui n'étaient pas d'accord avec ses directives est à la fois ignoble et inexcusable. Egalement nauséabonds sont les efforts pour minimiser ces mêmes horreurs. J'ai entendu : "C'était l'atmosphère de l'époque" ; comme si catholique ne voulait pas dire universel et par conséquent au-dessus de "l'atmosphère de l'époque". J'ai aussi entendu plus récemment : "Les tortures infligées aux hérétiques étaient des actions : elle ne modifiaient pas l'esprit du catholicisme." Comme exemple de jésuitisme, on ne fait pas mieux. On pourrait aussi s'étendre sur le traitement réservé aux soi-disant sorcières.

Cette intolérance, étouffée par une autre cruelle intolérance, celle de la révolution française, a continué de façon sous-jacente jusqu'en 1960 (en gros). Le clergé s'amusait à terroriser les enfants. La masturbation vous menait tout droit en enfer où vous teniez compagnie aux meurtriers, aux tortionnaires (mais pas à ceux de l'Inquisition semble-t-il), aux escrocs et aux dictateurs coupables de génocide. L'attitude envers les filles-mères et les homosexuels ne s'est améliorée que lentement et à contre-coeur. Cette église (les protestants ne font pas mieux) qui prêche la charité a toujours essayé, et souvent réussi, à ne pas la pratiquer.

Pris entre deux feux ? Alors quel est le deuxième ? C'est la nécessité de sauver notre patrimoine tout simplement. Les projets de restauration "à la moderne" de Notre-Dame de Paris, les refus de réparation des églises pendant que l'on construit des mosquées représentent un véritable suicide culturel. 

Cette destruction n'est pas seulement le fait d'une poignée d'hystériques : elle est aussi le résultat d'un autre suicide culturel : celui de l'église catholique elle-même. Pourquoi supprimer la messe en latin ? Pour que les fidèles comprennent ? En ce cas, pourquoi les missels pré-Vatican II étaient-ils bilingues (en général français à gauche et latin à droite ?). Les sociologues et psychologues (sauf les marxistes, évidemment) reconnaissent le besoin subconscient des foules pour un langage sacré. La répétition du langage sacré acquiert ainsi une dimension hypnotique et magique. Le latin aidait les fidèles à s'élever au-dessus des misères et frustrations de la vie quotidienne. "Introibo ad altare dei, ad deum qui laetificat juventutem meam..." C'est de la pure poésie, cela ne fait de mal à personne et c'est certainement préférable à une chasse aux sorcières. 


 

 

 220120

We are all familiar with irrational fears, especially among people we know, while less ready to admit the same obsessions for ourselves.

I do not like spiders, and I am certainly not the only one. For years I feared that, as I put on a shoe or a slipper, my toes would make contact with a wriggly spider. The very idea would send shivers through my spine.

Then, one day, it happened. It really happened ! I felt something on my toes as I put on a slipper. I hastily withdrew… and out came one of those gigantic, black house spiders that never seem to weave a web… only this one had several broken legs. To my own amazement, I felt sorry for what I saw for the first time as a magnificent and suffering creature. Yes, we can change ! 



dimanche 2 janvier 2022

 

David Stafford-Clark cité par Ruth Rendell :

She is afflicted with emotional immaturity in its broadest and most comprehensive sense. Impulsive, feckless, unwilling to accept the results of experience and unable to profit by them. Sometimes prodigal of effort but utterly lacking in persistence, plausible but insincere, demanding but indifferent to appeals, dependable only in their constant unreliability, faithful only to infidelity, rootless, unstable, rebellious and unhappy

Stafford-Clark décrit une psychopathe. Ce qui me frappe, chez Ruth Rendell, c’est qu’elle nous présente souvent une jeune femme qui est belle, attirante et non dépourvue de qualités mais qui correspond, en tout ou en partie, à la description qu’en fait Stafford-Clark. C’est un leitmotiv. Elle a dû souffrir elle-même de la présence d’une telle femme dans son entourage familial.