lundi 28 février 2022

 

AGNUS DEI

Si l’on considère la longue liste de tortures que l’humanité a infligées à ses propres représentants, on a honte d’en faire partie. Certes, les animaux peuvent être cruels les uns envers les autres. Oiselets qui poussent le plus faible d’entre eux hors du nid, lions qui tuent les lionceaux dont il ne sont pas les procréateurs, chimpanzés qui assassinent l’étranger venu s’aventurer dans leur groupe… on pourrait continuer ainsi pendant des heures. Même les abeilles piquent celles qui se trompent de ruche. Cette agressivité recouvre souvent le simple instinct de survie. Qu’elle soit génétiquement passée des animaux à l’homme n’a donc rien d’étonnant. La devise pourrait être  “La tribu d’abord”. 

Là où l’homme dépasse les animaux dans le domaine de l’indignité, c’est par l’invention de la torture. Elle est perpétrée par tous les groupes qui se sentent invulnérables, illustrant parfaitement le vieil adage : “Le pouvoir corrompt, le pouvoir absolu corrompt absolument”. 

J’ai souvent lu ou entendu dire que le XX° siècle avait inventé la guerre idéologique. On pense au nazisme et au communisme, mais ces idéologies ont simplement rempli le vide laissé par les religions. Si l’on compare le fanatisme des Catholiques envers les Cathares, les Juifs et les Protestants, celui des Protestants envers les Catholiques ou celui des Musulmans envers tous ceux qui ne sont pas musulmans, on observe peu de différence avec le fanatisme des Nazis envers tous ceux qui ne sont pas nazis ou celui des Communistes envers tous ceux qui ne sont pas communistes. Avec leurs chapelets d'atrocités, il n’y a aucune différence entre les guerres de religion et les guerres idéologiques. Elles sont toutes les deux à la recherche du pouvoir absolu. L’homme, semble-t-il, ne résiste pas au besoin de faire partie d’un groupe assez puissant pour imposer ses idées en faisant subir au reste de la population les plus horribles traitements.

Il y a longtemps qu’une partie de l’humanité prend conscience de cette tentation qui lui pourrit l’âme et le cœur. Dans la bible, c’est le concept du péché originel. On pense résoudre le problème en envoyant un pauvre bouc, qui ne comprend rien à ce qui lui arrive, mourir de soif dans le désert. L’absurdité rejoint facilement l’horreur dans les religions et les idéologies. On arrive au Nouveau Testament où un “prophète” pense pouvoir prendre sur lui ce péché originel. 

Certains y croient. Les Agnus Dei de Mozart, Fauré ou Barber nous arrachent des larmes, car en tant que représentant de l’espèce humaine, chacun de nous sait à quel point il peut lui-même être cruel et à quel point il aimerait être débarrassé de ce fardeau. Si nous avons de la chance, le monstre qui dort en nos poitrines se limitera à ne torturer que son propriétaire.  


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