mercredi 24 mai 2017

Manchester



L’attentat de Manchester évoque irrésistiblement celui du Bataclan. L’horreur se banalise, et même si l’on se sent un peu coupable de l’admettre, on se sent également assez éloigné de tout cela. Mais pas toujours…
Après le Bataclan, je suis allé rendre visite à une amie qui s’était cassé l’os du bassin en tombant. Elle m’a dit que sa nièce était l’une des victimes. Quelque chose a bougé en moi, et je me suis soudain senti beaucoup plus proche des victimes et de leur famille.

On ne peut pas prendre sur soi toute la misère du monde, mais quand cette misère vient vers nous, il est inévitable qu’elle nous affecte.

Il y a quelques décennies de cela, Amnesty International m’avait demandé de traduire de l’anglais au français une lettre destinée au dictateur marxiste du Bénin, Mathieu Kérékou. Lorsque les communistes prirent le pouvoir en 1974, ils mirent tous les prêtres catholiques, tous les pasteurs protestants et tous les chefs religieux animistes en prison : 12 par cellule. Ils étaient tellement entassés qu’ils devaient établir un roulement car seulement deux d’entre eux pouvaient, à la fois, s’étendre à même le sol. On me donna la liste des prisonniers de Cotonou. À ma grande surprise je repérai le nom d’un prêtre que j’avais connu. Ce Dahoméen et moi avions enseigné dans le même établissement. Ce n’étais pas un ami, seulement un collègue : bonjour, bonsoir, ça va ? C’est à cela que se limitaient nos rapports. Et pourtant, quand je vis son nom sur la liste, je sentis mes tripes se tordre de douleur. Voilà quelqu’un que j’avais connu, côtoyé, à qui j’avais parlé, et qui au moment même où je prenais connaissance du message d’Amnesty, subissait dans sa prison ce qu’il faut bien appeler de la torture, 24h sur 24, sept jours sur sept.   
Devais-je me sentir coupable de ne pas éprouver la même chose pour les autres prisonniers ? Je n’ai pas la réponse. Je me dis simplement que des moments comme ceux-là sont de grandes leçons d’humilité.

dimanche 7 mai 2017

Book Review Paul Hazard



Paul Hazard’s The Crisis of the European Mind.



Though published more than eighty years ago, this essay is still a best-seller, still relevant and still fascinating.

Paul Hazard describes himself as “a historian of mentalities”. To him, the last 20 years of the 17th century and the first 20 years of the 18th century are crucial in shaping the way we think, view the world, and gauge religions. That period in History is like the adolescence of the modern world.

Like all crucial periods of our past, it wasn’t born, armed to the teeth, from the thigh of Jupiter. Paul Hazard gives precursors their dues : Rabelais, Montaigne, Descartes and Bacon, to name but four. There are others.

Talking about adolescence, if you mention The Crisis around you, you’ll find that those who are enthusiastic about it, have generally read it (several times) during their teenage years. It has given them a good built-in bullshit detector, and that’s priceless. Never mind the date of publication : like diamonds, this book is forever.