vendredi 6 octobre 2017

Je sais, je sais !



On adore savoir. On aime moins faire l’effort de chercher à savoir. Quand l’homme préhistorique se demandait ce qu’il y avait au-delà de l’océan, ce qu’était le tonnerre, la course du soleil dans le ciel, la naissance, la souffrance et la mort, il se trouvait déjà des petits malins pour lui dire : “Moi je sais !” Ce fut la naissance des religions, la superposition de l’empire du rêve sur celui de la réalité.
Si l'on excepte l'alchimie, qui n'a jamais donné de grands résultats, la recherche scientifique n’existait pas au Moyen-Age. Cela n’empêchait nullement nos ancêtres d’élaborer de stupéfiantes techniques : moulins à eau et à vent qui ne se contentaient pas de moudre du grain ou de faire monter de l’eau. Ils actionnaient des scieries, des tanneries, des forges et bien d’autres activités mécaniques. N’oublions pas les extraordinaires machines de construction, responsables de nos châteaux-forts et de nos cathédrales (entre autres). En effet, il ne faut pas confondre science et technique.
À partir du XVI° siècle (en gros) on a opposé science et religion, la science étant à la recherche du réel, et la religion à la recherche de rien car, comme le dit Molière : “Les gens de qualité savent tout sans avoir jamais rien appris.” Les catholiques taxaient alors les scientifiques d’arrogants, un choix d’adjectif bien malheureux lorsque l’on compare ceux qui cherchent à savoir à ceux qui prétendent savoir. Certes, comme dans tous les milieux et toutes les professions, il ne serait pas trop difficile de trouver des savants arrogants, mais comparée aux affirmations péremptoires des religions, la science est un modèle d’humilité.
Les choses ont-elles changé ? C’est une question de degré. “Tout ce que je sais, c’est que je ne sais rien” disait Socrate. Ce que les scientifiques savent sans l’ombre d’un doute, c’est que chacune de leurs découvertes accouche d’une flopée de nouvelles questions et de nouveaux mystères à résoudre. Ils savent aussi que la science a, dans beaucoup de domaines, expliqué (en partie) comment ça marche, mais jamais pourquoi. Alors, dans ce vide gnostique, les héritiers des chamans et des papes se précipitent en criant : “Moi, je sais, je sais !”

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