dimanche 17 août 2025

Arrière-arrière-grand-mère.

Je viens de terminer une courte biographie de mon arrière-arrière-grand-mère, ou plutôt de ce qu'elle fut et de ce qu'elle a connu (dans certains cas subis) entre les âges de 12 et 24 ans.

"Vous avez dû vous plonger dans un tas de recherche", m'a-t-on dit. Eh bien non car j'ai connu le XIX° siècle. 

J'ai connu la petite maison dans le jardin et la fosse qu'il fallait déplacer tous les deux ans afin que "l'octueuse merde" repose, tue ses propres microbes et soit utilisée comme engrais afin de produire de merveilleux légumes : pommes de terre, tomates, laitues, haricots verts, petits pois et bien d'autres. Je pense aux rangées de persil mais aussi aux fleurs.

A la maison, l'hygiène était élémentaire : pot de chambre, seau hygiénique et "grande toilette" tous les samedis soirs. C'était l'occasion de changer de sous-vêtements. 

J'ai connu la lessive mensuelle, toujours faite en extérieur par beau temps, avec, sur un trépied chevauchant un feu de bois, une lessiveuse dont la pomme, par une brillante astuce de gravité, arrosait le linge toutes les 30 secondes à peu près.

J'ai connu une pièce appelée la laiterie où l'on faisait tourner à la main une écrèmeuse. Avec cette crème, nous faisions du beurre. On buvait un peu de petit lait mais la majorité allait aux cochons.

Ah oui, parlons-en des cochons. On les tuait sans état d'âme. Chaque ferme momentanément transformée en charcuterie : salage de la viande, évidage et nettoyage des boyaux puis confection de saucisses, saucissons et andouilles ces dernières mises à sécher dans la cheminée.

Notre moteur, c'était le cheval. Il tirait des carioles, des charrues et des machines agricoles époustouflantes de complexité : charrues, sarcleuses, moissoneuses, semeuses, faneuses et j'en passe. Tout cela cliquetait gaillardement du bout d'un champ à l'autre puis faisait demi-tour et recommençait. Quand un fermier avait besoin de se déplacer rapidement dans le périmètre du village, il sautait sur son cheval, souvent à cru, et trottait vers l'endroit qui l'appelait.

J'ai vécu tout cela. Non, ce n'est pas de la science-fiction. C'est simplement que je suis assez vieux (et je ne m'en vante pas) pour avoir vécu les années de guerre. Il y avait peu de tracteurs avant la guerre, et encore moins pendant. Les Allemands avaient pris toute l'essence et le gasoil. Dans les fermes, on avait ressorti les achines agricoles traditionelles qui avaient bien peu changé depuis le 19° siècle. 

Dans les musées, on s'extasie devant le mélange de précision et de complexité des machines à tisser et à broder de la Révolution Industrielle. Les machines agricole n'étaient pas de reste. 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

jeudi 15 mai 2025

Masters of Sex

In 1966 Human sexual response was being published in the United States by Masters and Johnson. As expected, most brain-washed church goers choked on it. Nowadays, there is a television series called Masters of Sex : a biography of the two authors. There were times (not so long ago) when film producers and directors were not allowed to show a couple in bed. Worse : film makers could not even show a toilet seat... It could be said that before the sixties, Americans did not have sexual or digestive systems.

Is it any better now ? Mention sex at work and some people can still get fired for it. Employers will find other reasons, of course : masters of hypocrisy !

Back to Masters of Sex itself, I see it as a very, very flawed masterpiece (no pun intended) . The basic idea was excellent, but why are all interior scenes shot in almost complete darkness ? There is absolutely no justification for it. My main criticism, however, is the fact that such a biography could have been presented in an excellent 90mn film. Yet it stretches out to something like 12 one-hour episodes. What a drag ! I gave up half-way through.

Such a pity, though ! The cinematography (when the scene is properly lit), the sound track and the music remind us of a genuine masterpiece called Why Women kill (part one) as is the obvious enthusiastic love of the director for gleaming American cars of the fifties and sixties.

vendredi 14 mars 2025

Frédéric Lenoir : Jésus et Dieu

 

 Notes de lecture : “Comment Jésus est devenu Dieu” de Frédéric Lenoir.

L’auteur fait montre d’une extraordinaire érudition. Certains conciles des tout débuts de l’Eglise sont répertoriés au jour près. On y observe un christianisme qui se construit de décennie en décennie et de concile en concile mais sur quoi ? En fait, tel un jeu de Lego, il se construit sur des suppositions, des suggestions, des opinions et des théories. Rien de concret. Frédéric Lenoir se rachète (si l’on peut dire) dans les dernières pages où l’on arrive enfin à l’essentiel : la tolérance et l’amour du prochain. Mais pas un mot sur les persécutions organisées, approuvées et commises par l’Eglise. Les horreurs des tortures infligées aux “hérétiques” sont passées sous silence. Dommage !... Autre regret : l'absence du bouddhisme dans l'élaboration du christianisme. Il y a tellement de copiés-collés entre ces deux religions ! Re-dommage…

vendredi 7 mars 2025

Vions VI

Constellation

Peu d’avions peuvent se targuer d'être aussi élégants que le Constellation de Lockeed. J’ai eu la chance, entre Cotonou et Paris, d’être l’un des derniers passagers à profiter de cette nostalgie. Le Constellation représentait tout ce qui, pendant les décennies de 1930 à 1960, symbolisait le fait que seuls les riches avaient les moyens de se payer un billet d’avion, surtout un billet transatlantique. Doit-on regretter cette époque ? Comme toutes les époques, elle possédait son charme et ses travers. Il faut la prendre comme elle était. C’est avec une douce émotion que j’ai retrouvé les vastes sièges, aussi spacieux que ceux des premières classes de nos jours. J'ai aussi retrouvé aussi l’espace généreux pour les jambes. Certes, nous étions loin de l’efficacité commerciale des Boeing et autres Airbus contemporains, mais quelle classe ! Quand on pense qu’il n'embarquait que 60 passagers ! J’ajoute la notice de Wikipedia : The Lockheed Constellation is a propeller-driven, four-engined airliner built by Lockheed Corporation starting in 1943. The Constellation series was the first civil airliner family to enter widespread use equipped with a pressurized cabin, enabling it to fly well above most bad weather, thus significantly improving the general safety and ease of commercial passenger air travel. 

Il effectua son dernier vol régulier sur une ligne intérieure américaine en 1967. Son dernier vol non-commercial le fit atterrir à Nantes en 1974.

 

jeudi 20 février 2025

Avions V

 


Caravelle

Nice-Paris. J’avais fait mon service militaire avec un ingénieur de son qui était le responsable de l'insonorisation de la Caravelle. Les réacteurs placés en queue lui avaient beaucoup facilité la tâche. La Caravelle était, en effet, le premier avion de ligne à posséder ses réacteurs à l’arrière. Mon ingénieur s’appelait Basile. Comment quelqu’un d’aussi jeune pouvait avoir eu de si importantes responsabilités ? Eh bien, justement, il n’était plus si jeune ; en tous cas moins jeune que ses camarades de la classe 59 car, de sursis en sursis, et fortement appuyé par Sud-Aviation, il avait 28 ans ! Un vieillard ! Maman Nature lui avait aussi fait perdre ses cheveux, ce qui accentuait les différences d’âge. 

Un moteur, c’est lourd. Une bizarrerie de la Caravelle était qu’à l’arrêt (et à vide) le nez avait tendance à se soulever de quelques centimètres, surtout si l’avion était stationné le nez au vent. Autrement, les pilotes adoraient ses qualités de stabilité qui lui permettaient de planer sur plusieurs centaines de kilomètres sans les moteurs. L'expérience ne fut pas faite avec des passagers à bord !

dimanche 9 février 2025

Avions IV

 

DC6 et DC7

Ces deux chevaux de trait du constructeur Douglas ont transporté des tonnes de marchandise et des centaines de milliers de passagers dans les années 60 et 70. En 1961 j’ai pris un DC7 de Paris à Cotonou. Rien de remarquable en cela mais la traversée du Sahara m’a laissé des souvenirs tenaces. Pendant plusieurs heures, nous restâmes suspendus, apparemment immobiles, au milieu d’une immense bulle entre le ciel et le sable mais cette bulle n’avait pas de frontière. Il était impossible de déterminer où finissait le sable et où commençait le ciel. Ils se fondaient progressivement l’un dans l’autre. On était en pleine science-fiction.

samedi 8 février 2025

Avons III

 

SO Bretagne

Marseille-Lorient

Autre vétéran de l’aviation, le S.O. Bretagne fut conçu en 1940 mais n’effectua son premier vol qu’en 1945. Son aspect était résolument moderne pour l’époque. Il ne déparerait pas sur un aéroport aujourd'hui. 

Le vol Marseille-Lorient ne fut pas dénué d’intérêt. Quelques minutes après le décollage, le capitaine annonça que le gyroscope était tombé en panne mais que, vu le temps magnifique et le vent négligeable, il avait obtenu la permission de continuer le trajet en VFR. Cela voulait dire voler à environ 200 Km/h au lieu de 400, et 9h de vol au lieu de 4. Peu importe quand on est jeune et qu'on a des sandwiches, des bouteilles d’eau et des cigarettes.  (qui ne fumait pas à l’époque ?).

La situation s’aggrava un chouilla quand le capitaine demanda d’une voix hésitante : “Y en a-t-il parmi vous qui auraient une carte Michelin de la France ?” Miraculeusement, l’un de nous en avait une.

Nous étions cependant loin de connaître la fin de nos ennuis. Arrivés au-dessus de Lorient, la voix du capitaine grommela : “Les gars, encore un pépin. Le train d’atterrissage ne descend pas. Il va falloir le faire manuellement. Vous trouverez la manivelle près du poste de pilotage. 

Chacun se porta volontaire mais nous avions sous estimé l’effort que cela impliquait. Même à plusieurs sur la manivelle, elle ne descendait que d’un ou deux centimètres à la fois. Il nous fallut une bonne demi-heure pour faire descendre le train d'atterrissage complètement. Au-dessous de nous, on apercevait les ambulances et les pompiers prêts à nous ramasser en petits morceaux.  

Fini les problèmes ? Que nenni ! Encore le capitaine : “Merci les gars. Je dois vous dire que le voyant indiquant le verrouillage du train d'atterrissage ne s’allume pas. S’il n’est pas verrouillé, il va se replier à l’atterrissage. Je veux que tout le monde se mette en position accident : assis, la tête entre les genoux, les mains sur la tête. Bonne chance !”

Fausse alerte. Le voyant ne s’était pas allumé mais le train s’était bien verrouillé. Le S.O. Bretagne reste ancré dans ma mémoire et cela dans ses plus petits détails…  

mardi 4 février 2025

Avions II

DC 3 Dakota

Oran-Kenitra

Tous les dix ans à peu près, quelqu’un publie la liste des Dakotas encore en service. En 2025 Il y en a encore dans les 200. Si l’on proposait au grand public de monter dans un avion âgé de 84 ans, beaucoup hésiteraient. Pourtant, ils n’auraient pas lieu de s’inquiéter. Un moteur dont on remplace religieusement des éléments quand ils ont besoin de l’être peut fonctionner indéfinitivement. Il n’en est pas de même de la carrosserie dont le métal fatigue. Celle du Dakota est encore solide car elle a été conçue avec des normes qui sont au moins le double de ce qui aurait été nécessaire au départ.

Le Dakota que j’ai pris n’avait “que” 21 ans. Evidemment, ce n’était pas du luxe. Le niveau sonore était élevé et il n’y avait pas de chauffage. L’appareil était chargé au maximum. Passer au-dessus de l’Atlas ne fut pas une mince affaire. Le vieil appareil s'essoufflait, moteurs donnant leur maximum. Nous n’étions pas à plus de vingt mètres de sol quand nous arrivâmes au sommet. Je n’oublierai jamais le regard effaré qu’un berger leva vers nous alors que nous passions d’un versant sur l’autre. 

 

lundi 3 février 2025

Avions

Avions

J’ai toujours aimé les avions. Enfant, je n’avais pas, comme beaucoup de gamins, l'ambition de devenir pilote de chasse ou pilote de ligne. Je n’ai toujours eu qu’une seule ambition et une seule obsession : écrire des poèmes et des romans. Ce n’est pas incompatible avec l’amour des avions. Voici une sélection de ceux qu’il m'est impossible d’oublier.



Bristol 170. 

Trajet : Cherbourg-Southampton (ou, plus précisément, Eastleigh). Cet engin bizarre pouvait transporter 3 voitures et 12 passagers. L’avant s’ouvrait comme une grande gueule. C’était le principe même des transbordeurs maritimes, mais limité à 3 voitures, et avec des tarifs exorbitants. Inutile de préciser que je n’étais QUE passager. Je n’avais pas de voiture. A part cela, l’avion se comportait comme un appareil bi-moteur ordinaire. 



Vickers Viscount 700S

Trajet : Gatwick-Saint Nazaire. Je me souviens d’un passager plus que de l’appareil. Le capitaine, comme il se doit, s’était présenté aux passagers par interphone. Il était Français, et de nom et d’accent. On décolle. La météo était excécrable. Nous étions secoués comme un panier à salade. L’un des passagers était une caricature vivante de l’officier britannique à la retraite : veste pied-de-poule, chemise à carreaux, cravate de régiment. Son visage couperosé, bien conservé par l’alcool, respirait la suffisance et la colère. Soudain il explosa (je traduis, évidemment) : “Mais qu’est-ce que c’est que ce foutoir ? Pourquoi nous ont-ils mis un pilote français ? Comme si on n’avait pas assez de pilotes remarquables en Angleterre ! Ce type serait incapable de prendre un main une bicyclette.” Hurla-t-il assez fort pour se faire entendre de tous.

Les passagers britanniques grinçaient des dents. Il y a des silences qui se font bien sentir.

Deux semaines plus tard, Saint-Nazaire-Gatwick, même avion, même temps pourri et… même colonel à la retraite. Nous étions secoués comme à l’aller. Une différence cependant : le pilote était anglais. Le colonel (si s’en était un) ne laissa pas de saisir l’occasion : “Ah, voilà nos braves pilotes anglais qui n’ont pas peur d’une petite tempête. Vive l’Angleterre !” Hurla-t-il pour le bénéfice des passagers, lesquels auraient volontiers rampé sous leur siège s'ils l’avaient pu.


 

dimanche 2 février 2025

Terrain miné

 

Terrain miné

Sur les terrains qui ont connu une activité industrielle, il reste souvent des poisons. Les permis de construire ne sont pas accordés. Les enfants n’ont pas le droit d’aller y jouer (ils y vont quand même, évidemment). 

Si, en Angleterre, on demande au hasard ce que les gens pensent de la France, les réponses sont naturellement mitigées. On saisit l’occasion de se moquer un peu des Français en leur prêtant des traits de personnalité qui sont devenus des clichés même s’ils sont souvent sans fondement. Moi-même, je ressens une pointe d’irritation quand des Français se mettent à critiquer quelque chose de façon pointilleuse : “Non, non, cher monsieur, ce n’est pas 90%, c’est 92%”. Typique, n’est-ce pas ?

Dans l’ensemble, les réactions vont de l'indifférence au positif. Une exception de taille : les enfants des classes ouvrières. Là, comme pour les terrains anciennement industrialisés, on retrouve le poison d’un vrai mépris et d’une haine authentique. Cela remonte peut-être à la Guerre de Cent Ans… J’en ai eu la preuve à Basildon quand un prof d’Histoire montrait à sa classe un épisode de “The World at war”, une magistrale histoire de la deuxième guerre mondiale, un chef d'œuvre du genre. Au moment où, sur l’écran, on montrait Hitler remontant les Champs-Elysées et contemplant l’Arc de triomphe, tous les élèves, sans exception, se mirent à applaudir et approuver bruyamment. Je l’avoue : cela m’a profondément blessé. Les remarques, même malveillantes sur les cuisses grenouille, c’est une chose, mais là, on était tombé bien bas. L’unanimité dans la réaction des élèves trahissait un empoisonnement véritablement sinistre.


mercredi 29 janvier 2025

Kenitra III

3. L'église. Agnostique, je ne vais pas à l'église pour assister aux offices, mais j'y vais si on y donne un récital d'orgue. L'un de mes amis dans l'Aéronavale s'appelait Julien Lessen. Ce nom de famille aux résonances anglaises ne l'empêchait pas d'être breton depuis plusieurs générations, depuis l'époque, probablement, où la Bretagne s'était offert le luxe d'une guerre civile en parallèle avec la Guerre de Cent ans. Julien jouait merveilleusement bien de l'orgue. Nous allions à l'église de Kénitra. Il jouait. J'écoutais.  

Cette année-là, l'église avait organisé une kermesse. Avec deux ou trois amis, j'avais monté un stand de massacre : on devait envoyer une balle de tennis vers une rangée de portraits en contreplaqué qui représentaient les officiers de la base aéronavale. Gros succès. Un Marocain, saoul comme une bourrique et buvant à même la bouteille, commença à hurler tout en agitant sa moustache sous le nez des femmes et des jeunes filles. "Il faudrait peut-être appeler la Police" suggérai-je. "Oh, malheureux, ne fais pas ça !" me dit le curé de la paroisse : "Ils vont le tabasser !" Trop tard. Quelqu'un nous avait devancés. Je vis deux policiers agripper l'ivrogne et le rouer de coups. Le sang giclait de son visage. La foule devint silencieuse. L'ivrogne fut entraîné hors de la fête. Nous nous sentions coupables.

 

lundi 27 janvier 2025

Kenitra II

 

2. Gordon. A la tour de contrôle, je travaillais souvent avec Gordon, un fort sympathique Américain qui  venait de Ogden, Utah. Et, de même que pour les Américains la France c'est Paris, Utah, pour les Français, égale Salt Lake City. Ogen a tout de même près de 100.000 habitants ! La ville est située dans un cadre montagneux magnifique. Quand le trafic aérien nous donnait le temps de bavarder, Gordon et moi bavardions. Il mettait souvent de la musique 'country' dans la tour. C'était une découverte en ce qui me concerne et j'en ai gardé le goût. Mais c'est surtout la musique classique qui nous a rapprochés. Bien peu d'Américains avaient conscience qu'elle existât mais, chez les Mormons, l'orgue et les chœurs du Tabernacle avaient habitué la population à certains aspects de musique classique. Un jour, Gordon et moi parlions des cinq concertos pour violon de Mozart quand il me demanda à brûle pourpoint : "Es-tu homosexuel ?" Je ne le suis ni ne l'étais mais je voulus savoir pourquoi il me posait la question. Gordon était fort embarrassé et me demanda plusieurs fois de lui pardonner. Il m'expliqua que j'étais quelqu'un d'assez calme, que j'avais un diplôme universitaire en littérature française, que je n'allais pas me saoûler tous les vendredis soirs et que je ne déguelais pas sur le trottoir en revenant d’un bar mal famé à quatre heures du matin. Pour beaucoup d'Américains, j'exhibais par là tous les signes de l'homosexualité. Je demandai alors à Gordon si lui, il était homo. Non. Pour se faire pardonner, dit-il, il m'invita à déjeuner au meilleur hôtel de Kenitra un jour où ni lui ni moi n’étions de service. Ce qui fut dit fut fait. On nous servit en entrée des cassolettes de gratin d'huîtres. Un délice ! Moment inoubliable entre amis.

lundi 20 janvier 2025

Ennuivers

Ennuivers

L'univers s'ennuyait.

Alors, il décida de créer la vie.

Ce ne fut pas un succès : les animaux se battaient et se bouffaient entre eux.

L'univers se dit que les choses iraient mieux si une seule espèce, en l'occurence l'espèce humaine, possédait la faculté de se souvenir du passé et de faire des projets pour l'avenir. C'est ce qu'on appelle la conceptualisation.

Ce fut encore pire. Les hommes se haïrent, se méprisèrent, se battirent et, pire que tout, s'infligèrent les pires tortures les uns aux autres.

L'univers est perplexe. Il se gratte la tête. Faut-il tout détruire pour recommencer à zéro ?

Recommencer ? Ah non, alors ! Mieux vaut s'ennuyer.