Je connais une femme que nous
appellerons Géraldine. Elle a 60 ans. Voilà 40 ans que je la connais. Toute sa
vie, elle a été assez déplaisante. Plutôt laide, sans être repoussante, elle a
jugé de tout et de tous d’une voix tonitruante. L’ensemble de ce qu’elle
n’aimait pas (une liste impressionnante) était baptisé absurde. Elle avait une
très mauvaise opinion de l’humanité entière, et l’humanité le lui rendait bien.
Elle se considérait comme la seule dépositaire de la sagesse, du bon sens et du
bon goût.
De nos jours, Géraldine est malade, très
malade. Système digestif, foie et reins sont sérieusement atteints. En toute
logique, on s’attendrait à ce qu’elle se comporte en personne exigeante,
intolérante et hypercritique.
C’est le contraire qui s’est produit.
Elle est aimable, elle sourit, ce qui ne lui arrivait pratiquement jamais, et
elle a arrêté de tout décrier. La transformation affecte même les traits de son
visage. Il n’est pas devenu beau, mais il est certainement devenu agréable et
même empreint d’une certaine noblesse.
Je me sens coupable ; non de
l’avoir repoussée, insultée ou méprisée, ce que je peux, la main
sur le cœur, affirmer n’avoir jamais fait. Mais mentalement, en mon fort
intérieur, oui je l’ai effectivement repoussée, insultée et méprisée.
Quelle leçon en tirer ? Doit-on
aimer les gens désagréables ? Ce n’est pas réaliste. On peut quand même,
comme une résolution de nouvel an, se dire qu’il peut y avoir des émotions
humaines et des qualités cachées parmi ceux qui, apparemment, font tout pour
qu’on ne les aime pas.
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