Comment expliquer le
phénomène de société que fut la révolution industrielle des XVIII° et XIX°
siècles, et pourquoi est-elle née en Angleterre plutôt qu’au Danemark, en
Ouganda ou au Mexique ? Et surtout, pourquoi pas, en France qui, avec
tous les pays occidentaux a certes connu aussi cette révolution, mais avec
cinquante ans de retard ?
Dans toute
situation complexe, il ne faut pas chercher une seule raison, mais un ensemble
de raisons qui, à un moment donné, affectent une partie de la planète ; ce
qui signifie que la première de ces raisons, c’est le hasard.
Le hasard a fait que
l’Angleterre soit positionnée sur d’énormes réserves de charbon. C’est
également le hasard si les problèmes rencontrés pour hisser ce charbon vers la
surface a poussé les inventeurs et ingénieurs de l’époque à construire les
premières machines à vapeur efficaces.
Une autre grande
raison, c’est la mentalité. Quand les propriétaires de mines ont voulu mettre
en place des systèmes d’extraction révolutionnaires, ils l’ont fait sans rien
demander à qui que ce soit. Quand ils ont voulu multiplier par dix le réseau de
canaux, ils n’ont pas rencontré de problèmes majeurs. Quand ils ont créé de
toutes pièces des milliers de kilomètres de chemins de fers, cela s’est fait en
un temps record.
Pendant ce temps, la
France avait créé l’Institut des Sciences, calqué peu ou prou sur le modèle de
l’Académie Française. Jusque-là, rien à dire. Malheureusement, les grandes
innovations industrielles devaient obtenir l’aval de cet institut avant d’avoir
le droit de se développer. Même chose pour les routes, les canaux et les
chemins de fer. L’étouffement systématique de l’économie par la bureaucratie
n’est pas, hélas, un phénomène récent. C’est un état d’esprit auquel les
syndicats se sont ralliés avec enthousiasme, et dont nous pâtissons tous les
jours.
On fait remarquer avec
raison que cette liberté d’entreprendre en Angleterre a conduit à un véritable
esclavage des ouvriers avec son aspect le plus révoltant : l’exploitation
des enfants.
Oui, chers Africains,
nous savons parfaitement ce que c’est que l’esclavage, car avant, pendant et
après la traite des noirs, nous l’avons imposé à des millions de nos propres
citoyens comme, d’ailleurs, vous l’imposiez aux vôtres depuis des siècles.
Si la bureaucratie
française nous avait épargné de telles horreurs, nous pourrions en être fiers,
mais il n’en est rien. Il suffit de lire Zola pour voir que nous avons connu à
la fois la camisole de force administrative, l’esclavage des prolétaires et la
pauvreté généralisée.
L’un des aspects les
plus tristes de cette situation, c’est que, parallèlement aux Faraday, Watt,
Joule et Darwin, nous avions aussi en France de très grands esprits scientifiques
: Lavoisier, Lamark, Laënec, Laplace (il semblerait que posséder un nom
commençant par « la » soit un avantage) mais aussi Cuvier, Buffon et
bien d’autres. Ils furent peu, ou pas assez écoutés. (Encore heureux si on ne
leur coupait pas la tête).
Et de nos jours ? Demandez
aux jeunes Français qui se sont établis en Angleterre pour y fonder une petite
ou très petite entreprise, ce qu’ils pensent de leur situation. La réponse est
presque toujours la même : « Mon niveau de vie n’est pas plus élevé
qu’en France ».
« Alors, pourquoi
restez-vous ? »
« Je me sens
tellement plus libre ! » En France, en effet, on a l’impression qu’il
va bientôt falloir remplir un formulaire en trois exemplaires, avec
autorisation du préfet, pour aller aux chiottes.
Ne nous étonnons pas si
les Britanniques ont choisi le Brexit. L’Europe les conduisait tout droit à
l’étouffoir.
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