lundi 5 septembre 2016

Morts de trouille

Réponse à une journaliste qui écrivait que, vu le nombre d'armes à feu aux États-Unis, et le nombre de victimes qui en résulte, les Américains sont morts de trouille :



Chère Madame,

Vous connaissez bien mal les États-Unis. Vous écrivez dans un journal de droite, mais vous avez gobé pas mal de clichés anti-américains distillés patiemment (et souvent avec talent) par les media de gauche, c’est-à-dire les média tout court.
Que diriez-vous d’un journaliste qui décrirait la France comme une vaste Seine-Saint-Denis ? Les mégapoles seront toujours plus dangereuses que le reste du pays, quel qu’il soit. Or, New York n’est pas plus dangereux que Paris (de nos jours, ce serait plutôt le contraire), et c’est précisément dans les mégapoles que les gens ont le moins d’armes à feu. On y est prudent, comme vous l’êtes certainement vous-même dans le métro parisien, mais on n'y est certainement pas mort de trouille. S’il en était ainsi à New York, adieu les concerts, les boîtes de nuit, les comédies musicales de Broadway, les théâtres et les restaurants.

Dès que l’on sort des grandes agglomérations, on change aussi de monde. Comme on ne parle bien que de ce que l’on connaît bien, je vais prendre comme exemple Arkadelphia, une ville de 35000 habitants à 2h de route de Little Rock. Allez-y : ce n’est pas une exception. Vous y verrez des voitures avec les clefs sur le tableau de bord pendant que leur propriétaire fait ses courses dans un supermarché, et des pick-ups avec de l’outillage valant des centaines de dollars laissés sur les ridelles. Le père de mon beau-fils a acheté l’une de ces énormes tondeuses à gazon qui ressemble à un petit tracteur. Il la laisse, en ville, devant chez lui. Elle y est depuis cinq ans. 

Dans les hameaux de la région, on croirait parfois être revenu aux années 50 en France, avec l’unique magasin du village qui vend de tout, le facteur qui s’arrête pour prendre des nouvelles de la vieille Mme Unetelle s’il sait qu’elle est malade, et les dimanches où 80% de la population se retrouve avec plaisir à l’église.

Lors d’une entrevue télévisée, Meryl Streep, mentionnant le fait qu’elle avait déménagé du Connecticut à New York, précisait qu’elle avait eu un mal de chien à convaincre ses enfants de fermer à clef la porte d’entrée, qu’ils soient dans la maison, ou qu’ils en sortent.

Non, chère madame, ce n’est pas le paradis, loin de là (mais je vois venir vos sarcasmes) et les armes à feu sont trop facilement disponibles. Personne ne vous contredira là-dessus. Mais n'oublions pas que, pour garder leur territoire de vente de drogue, les gangs de jeunes noirs et Portoricains se canardent gaillardement tous les soirs dans certaines banlieues, et gonflent ainsi les statistiques. Cela n'affecte pas le reste de la population. 

Alors, de grâce, arrêtez avec ce « morts de trouille ». La télévision et les films ne sont (heureusement) qu’un reflet exagéré d’une certaine réalité, mais comme le disait François Mauriac, « Quand tout va bien, il n’y a rien à raconter ».

J’ai vécu 10 ans aux États-Unis. J’y retourne tous les deux ans. Je m’y sens bien, et personne ne m’y a jamais menacé.
C’est un pays qui a d’énormes problèmes, mais pouvez-vous me citer un seul pays qui n’en a pas ? En tous cas, pour l’Amérique, « morts de trouille » ne fait absolument pas partie de la liste.

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